FEVRIER
2002
Méditation
Pauvres, heureux
êtes-vous
Alors que le monde chrétien entre
dans le temps que l'on qualifie généralement de
"carême", nous avons l'habitude de contempler
plusieurs sortes de textes, dont les béatitudes. Elles
sont neuf, d'après l'Évangile selon Matthieu, et
quatre d'après celui de Luc. Il est bon de les étudier,
surtout si nous faisons partie de cette portion de l'humanité
qui se tourne vers le Seigneur pour, parmi toutes les raisons
possibles, obtenir une certaine satisfaction, un exaucement de
voeu. Cela peut expliquer le nombre de personnes qui talonnaient
le Seigneur lors de ses périples en Galilée. Ils
avaient entendu parler de lui. Ses "exploits"
leur avaient procuré un espoir : la guérison, le
redressement des torts ou de l'injustice perçue, le réconfort
dans la tristesse, la promesse de l'accueil lorsqu'ils se trouvaient
isolés ou exclus, la satisfaction de désirs matériels.
Mais voici que Jésus promet à ses auditeurs un
autre niveau de bonheur, qui n'a que peu de rapports avec celui
que la société considère généralement
comme le critère de bénédiction. Le bonheur
de Jésus, c'est le renversement de l'ordre d'espérance.
Jésus nous propose parfois le contraire de ce que nous
lui demandons. Nous aurions tort d'essayer d'atténuer
ce qui semble être dur et inacceptable.
Cherchons-nous l'aisance matérielle? Jésus nous
affirme que la bénédiction est réservée
aux pauvres qui, seuls, hériteront du Royaume de Dieu.
Il ne s'agit pas d'une "théologie de la pauvreté",
semblable à la "théologie de la libération",
dont on faisait l'éloge il y a quelques années.
Jésus nous invite, non à devenir pauvres à
tout prix, mais à réordonner nos priorités.
Si nous cherchons la richesse, nous pouvons l'obtenir, mais si
c'est là la priorité dans notre vie, la satisfaction
risque fort de nous séparer de Dieu et de notre entourage.
La pièce d'argent tenue juste devant l'oeil cache le reste
du monde et on ne voit que cela.
Pour Luc, il n'est pas question d'une pauvreté spirituelle,
ni d'une attitude d'humilité, mais d'une pauvreté
absolue, au sens économique du terme. C'est difficile
à admettre, que l'on ait des problèmes de finances
ou pas. La pauvreté n'est pas ce que nous rechercherions.
Ce n'est pas gai! Alors pourquoi la considérer comme un
bienfait? Pourquoi en être heureux?
La réponse demeure dans la promesse.
Jésus constate une condition humaine, mais c'est justement
cela: une condition humaine. Dans l'économie divine, les
choses ne s'arrêtent pas là. La vie est un continuum,
comprenant une situation actuelle et un dénouement qui
viendra dans le Royaume. Le monde est présent, et le Royaume
vient. Le renversement des lots est promis, pour le meilleur
et pour le pire.
C'est assez différent de ce que
nous pensons d'habitude. En effet, nous avons souvent l'impression
de "posséder" Dieu par notre foi, de
penser que sa puissance nous donne droit à une satisfaction
immédiate de nos requêtes, à une protection
absolue dans le danger, à une garantie contre les inconvénients
de la vie. Dieu nous promet un accompagnement, même dans
notre misère, un réconfort par sa présence
certes, mais surtout par cette notion que, quel que soit notre
lot actuel, notre avenir est avec lui, en lui, par lui.
Sommes-nous donc pauvres, démunis, rejetés par
la société? Avons-nous faim et soif? Sommes-nous
tristes ou victimes de l'injustice? Qu'à cela ne tienne!
Nous appartenons à Dieu, et nous ne sommes jamais hors
de la portée de son amour et de sa compassion. Que Dieu
et sa volonté demeurent notre priorité. Le reste
trouvera sa juste place.
Hugh JOHNSON
(surintendant du district d'Afrique du Nord)
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