FEVRIER
2002
Déclaration
de femmes
concernant la situation mondiale
actuelle
1. Partout dans le monde des femmes
donnent naissance à des enfants. Quotidiennement elles
prennent soin d'eux et assurent ainsi qu'ils deviennent des adultes
responsables et matures. Partout dans le monde, des gens cultivent
la terre et contribuent à la vie de la communauté.
Partout dans le monde, des êtres humains produisent des
objets utilitaires et vivent de l'échange de leurs connaissances,
habiletés et ressources.
Ces faits fondamentaux du concept de civilisation signifient
que la civilisation est un phénomène mondial. Nous
nous élevons donc contre l'idée courante qui veut
que le monde se sépare clairement en parties civilisées
et parties non civilisées, ou même en un empire
du bien et un empire du mal.
Des traditions et des comportements qui encouragent et protègent
la vie existent dans toutes les cultures, et de même, chaque
culture connaît des traditions et des comportements qui
entravent la vie. Dans la situation de la politique mondiale
actuelle, il y a des pratiques qui sont clairement des entraves
à la vie : un capitalisme socialement indifférent,
des actes terroristes, l'armement technologique extrême,
l'exploitation abusive des ressources naturelles, l'incapacité
de supporter des différences culturelles, et la dynamique
de la vengeance et des représailles.
2. L'oeuvre civilisatrice des femmes se concentre traditionnellement
sur le bien-être des individus et des groupes, le plus
souvent dans un contexte familial. Par ailleurs, dans la plupart
des cultures existent des interdits plus ou moins rigides concernant
la possibilité pour les femmes d'avoir droit à
la parole en public ou en politique. Les intérêts
féminins, leurs valeurs et leurs contributions à
une société juste et harmonieuse sont souvent dévalorisés
et désavoués.
Et pourtant il est évident qu'aucune culture humaine ne
peut survivre sans les activités quotidiennes par lesquelles
les femmes préservent et donnent un sens à la vie.
Ainsi, dans les activités guerrières, on compte
sur la collaboration silencieuse des femmes dans l'arrière-plan.
C'est pourquoi nous insistons pour que les femmes et les hommes
qui donnent priorité à une vie commune en paix,
sortent de leur existence d'ombre et fassent entendre publiquement
leurs valeurs alternatives pour une cohabitation positive des
êtres humains dans le monde entier. Nous y voyons une perspective
mondiale pour une politique de paix, qui est déjà
pratiquée et qui doit être perçue et vécue
davantage.
3. En tant que femmes de sociétés occidentales
nous reconnaissons les libertés pour lesquelles les femmes
ont lutté avant nous. Ces libertés se manifestent
aujourd'hui par les droits égaux des femmes et des hommes
dans la vie privée et publique. Mais nous réalisons
que les buts des mouvements féministes ne sont pas encore
atteints. Les femmes ont obtenu l'égalité formelle
au sein de certaines cultures ; cependant, certaines valeurs
traditionnellement masculines sont considérées
comme les seules réponses efficaces pour résoudre
les conflits mondiaux: la compétition, la pensée
dualiste, la guerre et les autres mécanismes de domination.
Nous intervenons en faveur des valeurs féminines qui se
sont développées dans le cadre de l'oeuvre civilisatrice
des femmes, et nous voulons que ces valeurs soient reconnues
et appliquées. Les hommes comme les femmes peuvent les
mettre en pratique : en respectant autrui, en donnant la priorité
au bien-être concret plutôt qu'à l'application
de principes généraux ; en prenant conscience de
la vulnérabilité et des besoins fondamentaux de
tous les humains, en pratiquant l'écoute et la patience.
4. La religion fait partie de chaque civilisation humaine. Être
religieux signifie reconnaître des réalités
qui existent au-delà du pouvoir des individus. Ces réalités
permettent de donner un sens à la vie et la foi en elle
doit être respectée. Pour la finalité de
cette spiritualité élémentaire, non dénominationnelle,
on donnera aux autres humains, cultures et modes de vie, l'espace
nécessaire à leur épanouissement. Toutefois
personne ne peut posséder le Bien ; par conséquent,
la spiritualité vécue dans cette perspective humble
permet une ouverture sur des avenues chargées de surprises,
de nouvelles compréhensions, ainsi que des conflits et
des révélations qui viennent de cet Autre qui est
indisponible. De par sa nature, cet Autre (la divinité,
le divin) ne peut ni être possédé ni être
utilisé à des fins quelconques. Une telle compréhension
de la religion exclut donc que des individus ou des groupes jugent,
mettent en danger ou même tuent d'autres humains. Le christianisme
n'a malheureusement pas su éviter ce danger au cours de
son histoire. Partout où l'indisponible Autre est inscrit
dans des systèmes dogmatiques, il est abusé, par
exemple dans la mainmise du patriarcat sur le christianisme pendant
des siècles.
5. Partout dans ce monde on peut sentir le désir des femmes
de faire évoluer leur destin et celui de ce monde. Nulle
part les énergies qui travaillent à une meilleure
vie pour tous les humains ne peuvent être arrêtées.
À l'ombre de l'ordre patriarcal, apparemment omnipotent,
les signes du début d'un nouvel ordre sont évidents.
Par exemple, des Américaines se prononcent ouvertement,
dans la rue, dans les Églises, dans des journaux et même
au Congrès, contre la campagne de vengeance de leurs politiciens.
Des Afghanes osent continuer d'informer le monde de la situation
oppressive contre les femmes dans leur pays, mais aussi de leur
force. Elles travaillent infatigablement et dans les conditions
les plus difficiles pour un minimum d'éducation, de soins
de santé, de vêtements, de nourriture et de logement,
ainsi que pour un avenir démocratique de leur pays qui
donnera aux femmes le droit de participer à la vie publique
et politique.
En Israël et en Palestine, aussi
bien qu'en ancienne Yougoslavie, des femmes ont démontré
pendant des années que la lutte commune pour une vie en
paix est possible, même au-delà des frontières
et des fossés profonds.
Nous, des femmes de foi et féministes d'Allemagne, d'Autriche,
de Suisse et de plusieurs autres pays, nous exprimons par ce
manifeste notre solidarité avec toutes celles et tous
ceux qui travaillent dans le monde entier pour des idées
et des actes nouveaux.
Ensemble nous croyons à l'apparemment impossible. Notre
richesse réside dans la force de notre désir commun
pour une meilleure vie pour tous les êtres humains.
Cette richesse se manifeste par notre capacité à
faire confiance à nos propres observations, à notre
discernement et à nos intuitions, et en reconnaissant
les limites du pouvoir humain.
Nous sommes prêtes à apprendre ensemble, et l'une
de l'autre ; nous voulons être aussi honnêtes et
respectueuses que possible, et nous faisons confiance à
la force qui grandit par et dans les relations humaines.
Nous allons utiliser cette richesse généreusement
!
Les personnes qui souhaitent des renseignements au sujet du
manifeste peuvent s'adresser au Dr. Ina PRAETORIUS, une théologienne
qui a participé très activement à nos travaux
(i.praetorius@bluewin.ch).
Les personnes qui désirent co-signer le manifeste enverront
un e-mail à l'adresse suivante :
Frauenstudien - und bildungszentrum der EKD.
Dr. Herta LEISTNER
Herzbachweg 2
D-63571 Gelnhausen
Fax +49 6051 89287, e-mail fsbz.leistner@ecos.net
On peut aussi envoyer au Dr Herta LEISTNER la liste de personnes
signataires de ce manifeste. Elle insère ces nouveaux
noms dans la liste des signataires mise à jour tous les
deux jours.
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