JUIN
2003
SPECIAL
WESLEY
à
l'occasion du tricentenaire de sa naissance
Vie et oeuvre de
John WESLEY : quelques dates marquantes
A visiter
John WESLEY
- Les personnes qui l'ont influencé
John WESLEY et l'
«évangélisation»
WESLEY et les enfants
L'esprit oecuménique
WESLEY abhorrait
la «malédiction» de la guerre
Vie
et oeuvre de John WESLEY : quelques dates marquantes
1703 (17/06) : Naissance à Epworth
(G.B.) de John, 15e enfant (dont 7 morts en bas âge), du
pasteur Samuel WESLEY et de son épouse Susanna.
1707 : Naissance de son frère Charles, futur auteur de
plus de 6000 cantiques.
1720 : John WESLEY commence les études de théologie
à Oxford.
1728 : Il est ordonné pasteur de l'Église Anglicane.
1735 (14.10) à 1738 (01.02) : Expérience missionnaire
malheureuse de J.WESLEY en Géorgie (Amérique du
Nord).
« ... Je suis venu en Amérique pour convertir
les Indiens, mais qui me convertira, moi?»
1738 (24/05) : Conversion de J. W. lors d'une étude biblique
dans la rue Aldersgate à Londres
1738 (juin à septembre) : Visite en Allemagne aux Frères
Moraves et à leur fondateur, le comte ZINZENDORF
«... Je veux aller voir où vivent les chrétiens.»
1739 (17/02): 1re prédication de J.W. en plein air, adressée
aux mineurs de Bristol.
Réveil dans cette région. Dans cette même
année, création de la 1re «Société»
méthodiste dans
une ancienne fonderie de canons à Londres.
1744 : Réunion de la 1re «Conférence»
méthodiste à Bristol.
1768 : Ouverture du 1er séminaire méthodiste de
formation théologique.
1774 : J.W. fait publier une vigoureuse protestation contre l'esclavage,
intitulée «Pensées sur
l'esclavage».
1784 (24/12) : Fondation de l'Église Méthodiste
aux États-Unis d'Amérique.
1791 (02/03) : Décès de John WESLEY. Dans sa vie,
il a parcouru 200 000 miles à cheval et
prononcé 43 000 prédications.
A sa mort, les communautés méthodistes comptaient
100 000 membres, dont la moitié en Grande-Bretagne.
A
visiter
«Le méthodisme, John WESLEY»
Exposition au Musée du Protestantisme Dauphinois (F-26160
Le Poët-Laval)
Du 13 avril au 15 octobre 2003
Quelques extraits
de textes
Trois hommes
Trois hommes, tous trois formés à l'université
d'Oxford et tous trois ministres consacrés dans l'Église
anglicane, sont à l'origine du méthodisme.
John WESLEY (1703-1791), prédicateur infatigable. Il parcourut
plus de 360 000 km, la plupart du temps à cheval, et prononça
plus de 40 000 sermons. Il fut l'organisateur et le chef du mouvement.
Son influence fut consi-dérable. Beaucoup voient en lui
le père du protestantisme moderne.
Charles WESLEY (1707-1788), frère de John. Il fut
le chantre du méthodisme. Il fit chanter les foules qui
reprenaient ses cantiques dans les ateliers ou au fond de la
mine. Il écrivit plus de 6 000 cantiques dont certains,
devenus des classiques, sont chantés aujourd'hui encore
dans les Églises du monde entier: «Seigneur,
que n'ai-je mille voix pour chanter tes louanges et faire monter
jusqu'aux anges les gloires de ta croix?»
George WHITEFIELD (1714-1770), orateur exceptionnel. Certainement
le plus grand prédicateur que l'Angle-terre ait connu.
Un acteur de l'époque prétendit que WHITEFIELD
pouvait faire pleurer ou trembler ses auditeurs rien qu'en prononçant
le mot Mésopotamie ! Son influence s'exerça
surtout en Amérique où il se rendit à sept
reprises et y mourut d'une crise d'asthme.
Avec un organisateur de génie, un très grand poète
et un orateur exceptionnel, le méthodisme atteignit toutes
les couches de la population.
Trois innovations
L'expérience spirituelle de WESLEY et de ses amis, si
proche de celle de Martin LUTHER, les amena comme lui à
désirer le réveil de toute l'Église. Partout
où ils le purent, ils se mirent à proclamer le
message libérateur de la grâce de Dieu qui change
les coeurs et les vies.
Mais, devant l'opposition d'une grande partie de l'Église
officielle qui leur ferma ses temples et ses chapelles, ils furent
amenés à trois innovations qui bouleversèrent
la vie religieuse du pays et rendirent leur mouvement très
populaire, notamment auprès des masses laborieuses :
- La prédication en plein air. Pour la première
fois des prédicateurs sortaient des Églises pour
rejoindre le peuple là où il vivait. Et les foules
venaient nombreuses, jusqu'à 20 000 et même 40 000
personnes, en plein hiver parfois !
- La prédication itinérante. « Le
monde est ma paroisse », dit WESLEY. Il parcourut des milliers
de kilo-mètres et prêcha l'Évangile hors
des structures ecclésiastiques établies pour retrouver
la mouvance de la vie.
- La prédication faite par les laïques. L'innovation
la plus révolutionnaire. Pour la première fois
depuis des siècles, annoncer l'Évangile n'était
plus un privilège réservé au clergé.
Ces prédicateurs laïques, très proches du
peuple et de ses problèmes, donnèrent au méthodisme
son caractère populaire et démocratique.
Ces innovations conduisirent à un christianisme plus pratique,
moins théologique, atteignant le peuple dans son propre
quotidien.
La théologie
Dans ses traits essentiels, la théologie de WESLEY
et des Églises méthodistes est celle des Réformateurs.
Cependant, trois accents particuliers sont à relever :
- Importance de la vie spirituelle et du témoignage.
La préoccupation doctrinale passe au second plan. L'important,
c'est la vie nouvelle et sa mise en pratique. Le méthodisme
est plus un mouvement d'action que de réflexion.
- Importance de l'appel à la conversion. Tout être
humain doit se décider pour Jésus-Christ et c'est
à cela que les prédicateurs méthodistes
appellent inlassablement leurs auditeurs. John s'oppose à
la doctrine de la prédestination qu'il trouve «
very shocking » et, sur ce point, il se sépare
de son ami Geoge WHITEFIELD, calviniste convaincu.
- Importance de l'entière sanctification. C'est
la plus grande originalité du méthodisme. Dieu
appelle ses enfants à une vie de sainteté qu'on
reçoit, comme le salut, par la foi. C'est une expérience
ultérieure, distincte de la conversion et appelée
«seconde bénédiction ». Cette
doctrine influencera grandement les mouvements évangéliques
postérieurs, y compris le pentecôtisme.
Musée du Protestantisme Dauphinois
F-26160 Le Poët-Laval Tél. : 04.75.46.46.33
www.museeduprotestantismedauphinois.org
John
WESLEY - Les personnes qui l'ont influencé
Vers la fin de sa vie, John WESLEY insista
sur le fait que ses convictions étaient restées
les mêmes depuis le début du réveil méthodiste.
En regardant de plus près, nous découvrons qu'il
les a précisées et accentuées tout au long
d'une oeuvre de plus de cinquante ans. Nous remarquons également
comment il les a mises en pratique. Plusieurs personnes y contribuèrent.
Tiré de la couverture du livre de
l'auteur de cet article : Reluctant Saint ? A Theological
Biography of Fletcher of Madeley, Epworth Press 2001.
Jean-Guillaume
de la FLÉCHÈRE
L'influence la plus marquante sur WESLEY fut exercée
par un homme francophone, Jean-Guillaume de la FLÉCHÈRE.
Celui-ci naquit en Suisse romande, émigra en Angleterre
et devint prêtre de l'Église d'Angleterre tout comme
les frères WESLEY eux-mêmes. Dans ses traités
théologiques, de la FLÉCHÈRE souligna l'étendue
de l'oeuvre de la grâce divine autant dans l'histoire de
l'humanité que dans la vie d'un individu. Il visa comme
but de toute vie humaine d'être transformée par
la grâce afin d'aimer Dieu et son prochain.
Susanna et Samuel WESLEY
D'autres personnes encore contribuèrent
à façonner les convictions de base de John WESLEY.
Les deux parents
de John avaient des personnalités fortes et étaient
d'un caractère très différent. Les deux,
indépendamment l'un de l'autre, décidèrent
de quitter le mouvement dissident et de réintégrer
l'Église
d'Angleterre qui était une Église d'État.
Ils la considéraient comme la meilleure du monde. Les
deux appréciaient la littérature spirituelle des
puritains qui voulait amener l'homme à une vie qui plaît
à Dieu. Ils exprimaient tous les deux des convictions
théologiques claires : ils soulignaient l'importance de
la réponse de l'homme face à la grâce divine
qui lui est offerte et s'opposaient à la doctrine de la
prédestination. Le père consacra plusieurs années
à écrire un commentaire sur le livre de Job tandis
que la mère insista davantage sur les conséquences
pratiques de la doctrine chrétienne. C'est elle, Susanna
WESLEY, qui s'occupa également de l'éducation religieuse
de ses enfants. Il est intéressant de noter qu'elle s'y
appliquait avec autant de soin pour ses filles que pour ses fils.
Alors que John avait déjà quitté la maison
parentale depuis un moment, il continuait une correspondance
avec sa mère sur des questions de foi et de vie chrétiennes.
Trois auteurs de livres de dévotion
pratique
Dans ses premières années
d'études, John WESLEY décida de consacrer toute
sa vie à Dieu. Il voulait mener une vie sainte, c'est-à-dire
faire en sorte que toute sa vie appartienne à Dieu et
soit remplie de la volonté divine. Une amie le mena sur
ce chemin quand ils lurent ensemble des livres de dévotion
pratique. Trois auteurs les stimulèrent particulièrement
:
- l'évêque anglican Jeremy TAYLOR avec ses conseils
pratiques pour une vie sainte qui ne fuit pas ce monde ;
- le mystique catholique Thomas a KEMPIS par son appel à
suivre le Christ en mettant l'accent sur une vie spirituelle
intérieure en communion avec Jésus ;
- le contemporain William LAW avec sa redécouverte d'une
vie menée dans la perfection chrétienne selon le
modèle des premiers chrétiens.
John CLAYTON
Ainsi, la vie de John WESLEY fut scellée d'un but
immuable : « La sainteté du coeur et de la vie ».
Lorsque John WESLEY devint prêtre de l'Église d'Angleterre
et enseignant à l'Université, il s'occupa particulièrement
d'un meilleur accompagnement des étudiants. Suite à
l'initiative de son frère cadet Charles, des groupes estudiantins
se développèrent, se réunissant régulièrement
pour l'étude et la pratique religieuse. Quand John reprit
la conduite de ces groupes, il accepta des suggestions des participants.
Un des étudiants, John CLAYTON, fut frappé de la
misère sociale à Oxford et les étudiants
commencèrent des initiatives sociales et diaconales dans
des prisons, parmi des familles pauvres et en faveur des enfants
illettrés. Ils étaient convaincus que le but d'une
vie sainte doit se manifester par des actes concrets d'amour
envers le prochain.
Les frères moraves et Peter BÖHLER
En route vers les colonies américaines,
John et Charles WESLEY rencontrèrent des frères
moraves qui les introduisirent à une foi luthérienne
et piétiste. Les frères WESLEY furent étonnés
de la force intérieure dans la piété de
coeur des moraves qui chantaient des cantiques de louange au
milieu de tempêtes affreuses. Pendant la courte période
passée en Amérique, John reprit l'idée morave
de se réunir en petit groupe pour échanger les
expériences de chacun et progresser ensemble dans la foi.
Il l'appliqua dans l'organisation d'une Église locale
au sein de l'Église d'Angleterre en Amérique. Dorénavant
s'y ajouta la conviction que le but d'une vie sainte ne peut
être atteint qu'à travers un engagement des fidèles
dans de petits noyaux communautaires.
De manière douloureuse, John et Charles WESLEY s'aperçurent
que leurs meilleurs efforts ne menaient pas au but. De retour
en Angleterre, le morave Peter BÖHLER les conseilla. Il
souligna qu'aucun homme n'est juste devant Dieu à cause
de ce qu'il fait, même s'il se donne énormément
de peine pour être un homme de bien. Seul la confiance
en la miséricorde de Dieu, révélée
en Christ, peut le rendre juste et le réconcilier avec
Dieu. Plusieurs entrevues furent nécessaires jusqu'à
ce que John et Charles WESLEY reconnaissent que ce conseil est
biblique et jusqu'à ce que l'acceptation intellectuelle
devienne une certitude existentielle. Ils découvrirent
alors une force jusqu'alors inconnue qui libère et renouvelle
l'homme. Une conviction brilla en eux avec la clarté et
la puissance du soleil : mener une vie sainte demeure un but
magnifique. Il faut continuer autant qu'avant à s'engager
dans ce monde par des actes d'amour envers le prochain et constituer
des cercles pour tous ceux et celles qui sont sur le chemin vers
ou dans la foi, mais la force de parvenir au but d'une vie sainte
et joyeuse ne vient que de Dieu et par sa grâce. La porte
qui permet d'y accéder est la foi en Christ.
Patrick STREIFF
John
WESLEY et l' «évangélisation»
Au risque de désorienter certains
de nos lecteurs et lectrices, il me faut faire remarquer qu'il
n'est pas tout à fait exact de qualifier, comme on le
fait très généralement, de mouvement d'évangélisation
le puissant mouvement de réveil qui secoua spirituellement
l'Angleterre du XVIIIe siècle et qui fut lié à
l'apparition et à l'expansion fulgurante d'un méthodisme
«wesleyen».
Un mouvement d'évangélisation?
Bien sûr la prédication de l'Évangile
connut, dans les décennies d'activité inlassable
de WESLEY et de ses compagnons, une ampleur qu'elle n'avait plus
connue depuis longtemps et qui cherche d'ailleurs toujours son
pendant aujourd'hui. WESLEY a pris une place largement méritée
dans la galerie des grands «évangélistes»
de l'histoire de la chrétienté, place que personne
ne lui contestera. Pourtant, son mouvement fut en fait davantage
un mouvement de «mission populaire» que d'
«évangélisation», du moins dans
le sens où ce mot est employé aujourd'hui dans
la plupart de nos Églises dites évangéliques.
Une dimension diaconale et sociale
Il y avait dans l'évangélisation telle que
WESLEY la pratiquait une dimension diaconale et sociale tout
à fait frappante pour l'observateur d'aujourd'hui. Certes,
il a prêché la bonne nouvelle de l'amour de Dieu
manifesté en Jésus-Christ. Cette communication
verbale du message évangélique comportait tous
les éléments du message du salut tel que le Nouveau
Testament le laisse entrevoir et qu'il m'est évidemment
impossible de rappeler comme il le mériterait dans un
article limité à une page. Rien ne manquait à
l'orthodoxie de la base doctrinale biblique sur laquelle était
fondée la prédication de WESLEY. Il disait inlassablement
ses auditeurs perdus dans leur péché et leurs aliénations
diverses, les invitait à saisir
dans la foi l'offre gratuite du pardon divin que leur avait gagné
Jésus, le Christ de Dieu, par son sacrifice volontaire
sur la croix. WESLEY ne cessait de prêcher que la réponse
humaine à ce message, lorsqu'elle est positive, se voit
toujours suivie d'une transformation intérieure et extérieure
dans la vie de ceux et celles qui auront accepté de saisir
cette main que Dieu leur tend.
Seulement, il ne faut surtout pas oublier que cet «évangéliste»
WESLEY ne s'est jamais contenté de la simple proclamation
verbale des choses que nous venons d'évoquer. Partout
où le besoin s'en faisait sentir, il accompagnait sa proclamation
de l'amour de Dieu d'actes de miséricorde extrêmement
concrets et susceptibles de rendre visible et palpable la miséricorde
divine qu'il venait de proclamer. La création de caisses
de prêts et de pharmacies populaires - voire de petits
dispensaires, les collectes de vêtements, l'organisation
de visites systématiques des pauvres et des prisonniers,
l'alphabétisation des innombrables enfants défavorisés
de l'époque ne sont que quelques exemples de l'extraordinaire
activité diaconale et sociale sans laquelle, pour WESLEY,
il ne pouvait y avoir d'évangélisation authentique.
La religion: une affaire sociale
Il faut ajouter que la forte dimension communautaire que
WESLEY donnait spontanément à toute son action
montre aussi que le salut qu'il prêchait et qu'il concrétisait
si bien était également un salut qui dépassait
l'individu pris isolément. Certes, WESLEY ne doutait pas
un seul instant que la question du salut doive être considérée
comme une question éminemment personnelle. La découverte,
lors de sa propre conversion, que ce que le Christ avait accompli
était «pour lui, pour lui personnellement»
avait été bien trop bouleversante pour qu'il pût
l'oublier. Mais, comme il aimait à le répéter,
«la religion est une affaire sociale», c'est-à-dire
que tout ce dont il est question dans le christianisme dépasse
largement l'individu pour placer celui-ci dans une communion
avec les autres. C'est ensemble qu'on marche vers le Royaume
de Dieu. L'évangélisation est, pour WESLEY, l'initiation
à ce Royaume de Dieu. C'est cette introduction initiale
qui, certes, devra être suivie d'une croissance tous azimuts,
mais qui d'emblée prendra des formes qui font éclater
le cadre et le sens beaucoup trop étroits du terme d'évangélisation
tel qu'on a tendance à le comprendre aujourd'hui.
Michel WEYER
WESLEY
et les enfants
Tout récemment,
en recherchant d'anciens documents sur le méthodisme,
nous avons trouvé une petite brochure intitulée
«WESLEY d'après son journal».
Ce sont des extraits classifiés et traduits par le pasteur
W-H.GUITON, édités par les Publications Méthodistes.
Cette brochure de 76 pages est épuisée depuis longtemps.
Peut-être vaudrait-il la peine de la rééditer?
Citant Matthieu LELIEVRE, le pasteur GUITON commence son introduction
par ces lignes :
De toutes les publications de WESLEY, la plus intéressante,
celle qui peut le mieux nous faire connaître son oeuvre
et sa personnalité, est sans contredit son «Journal»,
qui constitue «une autobiographie incomparable».
Nous avons sélectionné un chapitre qui
nous montre WESLEY sous un jour qui est sans doute moins connu
que d'autres.
Bonne lecture
Gladys & Pierre GEISER
WESLEY et les enfants
Lundi 4 juin 1743 et les jours suivants, j'ai eu le temps de terminer
les «Instructions for children» (conseils aux enfants).
Jeudi 14 avril. J'ai mis à part une heure chaque
semaine pour rencontrer les enfants de nos quatre écoles.
Nous avons vite pu nous apercevoir de l'effet produit par ces
entretiens sur les enfants. Quelques--uns d'entre eux ont reçu
des impressions profondes et durables.
Dimanche 12 octobre 1760 (Kingswood). Dans le courant
de l'après-midi, j'ai demandé aux enfants dont
les parents font partie de notre société de se
réunir à Bristol. Trente de ces enfants sont venus
ce jour-là et environ cinquante autres sont venus le dimanche
et le jeudi suivants. J'en ai réparti la moitié
en quatre classes, deux pour les garçons et deux pour
les filles et j'ai choisi des « conducteurs » qualifiés
chargés de s'occuper de chacune de ces classes. Je voyais
ces enfants tous ensemble une fois par semaine. Dieu ne tarda
pas à toucher le coeur de plusieurs d'entre eux.
Dimanche 5 octobre 1766. J'ai prêché à
Bristol plu-sieurs soirs de suite sur l'éducation des
enfants. Quelques personnes répondirent à cet effort
par cette objection ridicule et misérable : « Il
n'a pas d'en-fants ! » Mais plusieurs, animés d'un
esprit de droitu-re, s'inclinèrent devant la vérité
et se reconnurent coupables devant Dieu.
Jeudi 31 octobre 1768. J'ai vu les enfants et leur ai
parlé : Voilà une oeuvre qui mettra à contribution
le talent des meilleurs prédicateurs anglais.
Jeudi 4 juin 1772. A cinq heures, je pris congé
de ces amis. Je fus surpris, en les regardant attentive-ment,
de remarquer un si grand nombre de belles et nobles figures,
telles que je n'en ai jamais vues d'aussi belles dans aucun auditoire.
Je fus surtout frappé par les enfants, douze ou quatorze
d'entre eux, presque tous des garçons, étaient
assis en face de moi. Mais je crois que cette beauté était
due à la grâce plus encore qu'à la nature
; elle provenait sur-tout de la vie céleste qui, agissant
dans les coeurs, se révélait sur les visages.
Mardi 8 juin 1784. Je suis allé à Stock
upon-Tees. Il s'y fait une oeuvre admirable parmi les enfants.
Plusieurs de ces enfants, entre six et quatorze ans, sont ardemment
désireux d'être sauvés. Plus de soi-xante
sont venus à plusieurs reprises pour s'entre-tenir avec
nous ; ils paraissaient très sincères.
A midi, j'ai prêché sur ce texte : « Le royaume
des cieux est proche. » Tous semblaient profondément
émus. Aussitôt que je fus descendu de chaire, je
fus entouré de tout un groupe d'enfants. Tous se mirent
à genoux. Je m'agenouillai à côté
d'eux et me mis à prier pour eux. La flamme divine se
com-muniqua d'un coeur à l'autre.
N'est-ce pas un phénomène absolument nouveau dans
l'ordre spirituel? Dieu commence son oeuvre parmi les enfants.
Il en a été de même en Cornouaille-s, à
Manchester, à Epworth. Puis, des jeunes, la flamme de
vie a gagné les aînés, de sorte que tous,
petits et grands, connaissent Dieu et l'adorent.
Samedi 19 avril 1788. Nous sommes allés à
Boston où j'ai prêché le soir dans une des
plus élégantes chapelles du royaume devant un auditoire
extrêmement attentif. Je reconnais que, dans aucune réunion
méthodiste, on ne peut trouver de pareils chanteurs. Nous
avons ici une centaine de garçons et de filles, choisis
parmi les élèves de nos écoles du dim-anche
admirablement exercés au chant ; il est im-possible de
trouver un pareil choeur dans aucune chapelle, cathédrale
ou salle de concerts. L'expression de plusieurs d'entre eux s'harmonise
si bien avec la mélodie qu'il est impossible de décrire
l'effet produit. Seul le chant des anges, dans la demeure de
notre Père céleste, peut être plus sublime
que celui-là.
Dimanche 20 avril 1788. (Boston) J'ai réuni, à
trois heures de l'après-midi, de neuf cents à mille
élèves de nos écoles du dimanche. Je n'ai
jamais vu pareil spectacle. Ils étaient tous habillés
avec propreté et simplicité. Ils se sont tous comportés
avec beaucoup de sérieux. Beaucoup, garçons et
filles, avaient de beaux visages. Quand ils chantaient, tous
ensemble, sans qu'aucun fît entendre une note discordante,
leur mélodie était plus parfaite que celle d'aucun
théâtre.
Mais il y a mieux encore que leur talent musical. Beaucoup d'entre
eux craignent Dieu et quelques-uns se réjouissent de la
joie du salut. Ils sont un exemple pour toute la ville. Leur
passe-temps habituel consiste à visiter les malades pauvres,
à les exhorter, à les consoler et à prier
avec eux. Souvent ils se réunis-sent au nombre de dix,
trente ou quarante pour chanter et prier ensemble. Ils chantent
et prient avec tant de ferveur qu'il leur est très pénible
d'avoir à se séparer.
L'esprit
oecuménique
Au XVIIIe siècle, l'Église
anglicane était une Église d'État. John
WESLEY y appartenait de pleine conviction et le réveil
méthodiste se répandit en son sein tout au long
de la vie de WESLEY, même si beaucoup d'ouvrages populaires
font croire que WESLEY fut exclu de son Église. WESLEY
demeura prêtre de l'Église anglicane et fut même
reçu chaleureusement dans beaucoup d'Églises locales,
vers la fin de sa vie. L'Église anglicane avait une position
dominante dans la société, autant en Angleterre
qu'en Irlande où elle était appelée Église
d'Irlande. Sur cette île elle était minoritaire,
car la majorité de la population était restée
catholique. Lorsque le réveil méthodiste se répandit
dans des régions fortement catholiques de l'île
autour de 1748/49, des émeutes graves se produisirent
à Cork.
Deux écrits d'importance capitale
Peu après les premières émeutes, John
WESLEY fit une nouvelle tournée de prédication
en Irlande. Il y publia une lettre ouverte à un catholique
romain et rédigea le sermon L'esprit catholique
(catholique dans le sens initial d'oecuménique).
Les deux écrits de 1749 témoignèrent d'une
ouverture étonnante envers les catholiques. Il faut se
souvenir de la situation de l'époque. WESLEY héritait
les craintes de tous les protestants anglais face au papisme
(NDLR : c'est ainsi qu'ils appelaient le catholicisme)
et à son influence politique. Cette crainte fut ranimée
par le soulèvement militaire et l'invasion de ceux qui
favorisèrent la lignée catholique sur le trône
anglais en 1745. Mais au niveau des droits civiques en faveur
des catholiques, WESLEY resta méfiant et défavorable
dans plusieurs de ses traités.
Du catholicisme déguisé?
Au début du réveil, un évêque
anglican soupçonna le méthodisme de n'être
autre chose que du papisme déguisé. WESLEY publia
les deux écrits mentionnés ci-dessus, qui étaient
néanmoins étonnamment conciliants envers les catholiques.
Dans les deux, WESLEY en resta au niveau théologique et
n'aborda pas le domaine politique. Il souligna ce qui unit tous
les chrétiens en se référant à la
Bible et à la confession de foi qui date du temps du christianisme
non-divisé. Ainsi il essaya de montrer ce qui est commun
au niveau doctrinal et moral. Toutes les doctrines essentielles
qui ont été fixées lors des premiers conciles
de l'Église sont professées par tous les chrétiens.
WESLEY distingua les doctrines essentielles, qui devaient être
communes, et les opinions, qui pouvaient diverger. Il jugeait
important d'avoir des convictions claires quant à ces
opinions mais elles ne devaient pas affaiblir l'amour réciproque.
C'est là le but du sermon « L'esprit catholique
» : il y a certes des différences d'opinions entre
nous, mais celles-ci n'empêchent pas d'aimer. Dans la mesure
du possible, c'est-à-dire en restant fidèle à
son Église et à ses caractéristiques, il
faut collaborer pour faire avancer le règne de Dieu. L'esprit
oecuménique est un esprit d'amour.
Après John WESLEY
Au XIXe siècle, cet esprit oecuménique a puissamment
stimulé des chrétiens méthodistes à
s'engager dans le cadre de l'Alliance Évangélique
ainsi que pour unir les différents courants du méthodisme.
Au XXe siècle, des méthodistes se sont engagés
pour promouvoir également le mouvement oecuménique.
Ils étaient animés de ce même esprit qui
garde ses convictions, mais agit autant que possible en accord
avec des chrétiens d'autres Églises.
Patrick STREIFF
WESLEY abhorrait la « malédiction
» de la guerre
En ces temps troublés,
l'engagement du mouvement méthodiste en faveur de la paix
et de la justice sociale est un impératif de l'Évangile
- exactement comme il l'était à son époque
pour John WESLEY, le fondateur du mouvement. John SINGLETON,
rédacteur à l'hebdomadaire Methodist Recorder à
Londres, revient dans les lignes qui suivent sur la position
adoptée par John WESLEY par rapport à la guerre.
Un discours qui n'est ni déphasé ni dépassé
par les temps qui courent.
WESLEY le pacifiste
En un temps où il semblait
ne pas y avoir d'alternative à l'usage de l'épée
pour résoudre les querelles internationales - seule une
poignée de Quakers criaient dans le désert - WESLEY
s'est en fait élevé en termes énergiques
contre ce qu'il considérait comme étant la pure
folie de la guerre. Bien qu'on ne puisse l'appeler un pacifiste,
il n'en pensait pas moins que la guerre était «
la plus infecte des malédictions » qui défigurent
l'humanité. Il l'a décrite comme étant la
négation - voire la crucifixion - de tous les meilleurs
attributs de la civilisation; elle n'est rien moins qu'une rébellion
contre l'humanité et Dieu.
«La guerre est un ignoble reproche contre le nom de
chrétien - oui, contre le nom d'homme, elle est contraire
à la raison et à l'humanité»,
a dit WESLEY, ajoutant : «Et quand la guerre éclate,
Dieu est oublié. Aussi longtemps que ce monstre se déplace
de façon incontrôlée, où sont la raison,
la vertu, l'humanité? Elles sont complètement exclues.»
Une réaction en chaîne de compassion
En 1758, la Guerre de sept ans étant à son
paroxysme - la France et l'Autriche se battaient contre l'Angleterre
et la Prusse - les frères WESLEY publièrent leurs
«Hymnes d'intercession pour toute l'humanité.»
Les lignes suivantes reflètent leur point de vue sur les
conflits armés: «Nous nous lamentons sur l'aspect
actuel de notre terre où les flots de méchanceté
débordent, où les hommes, tels des ennemis, s'entre-déchirent
dans la rage infernale de la guerre.»
En 1759, Wesley marcha jusqu'à Knowle, près de
Bristol, pour y voir un camp de Français faits prisonniers
pendant la guerre de sept ans. «On nous a dit qu'environ
1 100 d'entre eux étaient enfermés dans ce petit
endroit, sans rien d'autre qu'un peu de paille sale pour s'y
coucher, sans rien pour se couvrir, de jour comme de nuit, sinon des hardes
sales et élimées,»
rapporte-t-il. «J'en ai été très
affecté et ai prêché ce soir-là sur
"Tu n'opprimeras pas l'étranger ; vous connaissez
vous-mêmes la vie de l'étranger, car vous avez été
étrangers au pays d'Egypte (Exode 23, 9)" .»
WESLEY se mit ensuite à récolter des fonds pour
acheter des pièces de lin et de laine, de quoi fabriquer
des vêtements qui furent par la suite distribués
aux prisonniers de guerre les plus nécessiteux. Après
cela, il ne fallut pas longtemps pour que les autorités
de la ville de Bristol offrent une grande quantité de
matelas et de couvertures. Dès lors, des dons commencèrent
à affluer en provenance d'autres régions de Grande-Bretagne.
Les méthodistes avaient mis en route une réaction
en chaîne de compassion.
La guerre inspirait à WESLEY une horreur extrême
Plus tard, lorsque les tensions avec les colonies américaines
gagnèrent en intensité, WESLEY écrivit à
Thomas RANKIN et à d'autres parmi les pasteurs en Amérique,
les suppliant d'user de leur influence en faveur de la paix.
En 1776, au plus fort de la guerre révolutionnaire, WESLEY
rédigea son «Opportune adresse à la partie
la plus sérieuse des habitants de la Grande-Bretagne au
sujet du malheureux conflit entre nous et nos frères américains.»
Ce document montre de façon éloquente l'horreur
extrême que la guerre inspirait à WESLEY.
Décrivant les armées lancées l'une contre
l'autre dans la bataille, il demanda: «Mais que vont-ils
faire? Se tirer mutuellement des balles dans la tête ou
le coeur, se poignarder ou s'étriper les uns les autres?
Pourquoi cela? Quel mal s'étaient-ils infligé les
uns aux autres? Aucun, vraiment. La plupart d'entre eux sont
de parfaits inconnus pour les autres. Mais il y a désaccord
sur le mode de taxation. Alors ces concitoyens, enfants des mêmes
parents, doivent s'assassiner les uns les autres le plus rapidement
possible pour démontrer qui a raison. Qu'est-ce là
comme argumentation? Quelle est cette manière d'apporter
une preuve? Quelle stupéfiante façon de décider
de l'issue d'une controverse!»
Puis, suggérant un arbitrage impartial au lieu de l'effusion
de sang, il demande: «N'y a-t-il pas d'hommes sages
parmi nous? Personne qui soit capable de juger entre frères?
Mais le frère va en guerre contre le frère, et
cela en pleine vue des païens. Il y a certainement un vilain
mal parmi nous. Comment les sages ont-ils perdu leur sagesse?
Quel déferlement de folie et de démence qui s'abat
sur nous!»
Il mettait lui-même ses conseils en pratique
Une chose est certaine: WESLEY n'était pas le genre
de personne à donner des conseils en se tenant à
distance, sans être prêt à les mettre lui-même
en pratique. Il a constamment encouragé les premiers méthodistes
à ne pas rendre coup pour coup lorsque des foules hostiles
cherchaient à les intimider. Et lorsqu'il était
attaqué personnellement, il a toujours cherché
à garder une attitude paisible et non-violente. Il cite
dans son journal un incident - un parmi bien d'autres - qui a
eu lieu en 1743, alors qu'il était en tournée de
prédication dans l'Ouest de l'Angleterre.
«La populace de la ville fit irruption dans la salle
et provoqua un grand désordre; ils hurlaient et frappaient
ceux qui étaient sur leur passage comme s'ils étaient
possédés par "Légion" lui-même»,
écrivit-il. «J'aurais volontiers demandé
aux nôtres de rester tranquilles; mais ni le zèle
des uns, ni la peur des autres n'avaient d'oreilles. Comme le
tumulte augmentait, j'allai au coeur de la mêlée,
saisis le meneur de la bande et le traînai jusqu'à
la chaire. Je reçus un coup sur le côté de
la tête, après quoi nous avons discuté jusqu'à
ce qu'il devienne de plus en plus conciliant et finalement commence
à calmer ses compagnons.»
Un exemple à suivre
Au moment où des nuages de guerre continuent à
s'amonceler au-dessus de l'Irak* et où de très
nombreuses personnes dans le monde entier s'expriment en faveur
de la paix, l'exemple de WESLEY ne peut qu'encourager les méthodistes.
Et à une époque où l'arrivée de demandeurs
d'asile des pays plus pauvres continue à confronter les
gouvernements et les Églises d'Europe occidentale à
des choix difficiles en termes de vies humaines, nous pouvons
nous rappeler la manière dont WESLEY fut un ami pour l'étranger
dans son pays.
Après tout, ne dit-on pas que les méthodistes sont
les amis de tous et les ennemis de personne?
* Article rédigé à la veille de la déclaration
de guerre à l'Irak.
Service de presse évangélique méthodiste
(UMNS)
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