JUILLET
& AOUT 2002
Méditation
"
Je partirai pour l'Espagne " (Ro 15.28)
On verrait bien ces mots sur une affiche
publicitaire invitant les gens à visiter ce pays. C'est
peut-être aussi le souhait de nombreux français:
partir à la découverte de l'Espagne.
Celui qui a écrit ces mots n'était pas français
et n'envisageait pas de faire du tourisme en Espagne. C'était
l'apôtre Paul. Son but, exprimé dans la lettre qu'il
a écrite aux chrétiens de Rome, était d'abord
d'aller dans la capitale de l'Empire pour en faire une "base
missionnaire"; de là il pensait certainement
partir avec quelques coéquipiers pour la péninsule
ibérique et y annoncer l'Évangile de Jésus-Christ.
Or, on le sait, Paul n'a pas pu réaliser son projet: il
n'a jamais mis les pieds en Espagne. Par contre, il a été
à Rome, mais pieds et poings liés, assigné
à résidence dans une des prisons de la ville. La
route pour l'Espagne lui a été barrée.
Des routes barrées, des projets avortés, nous en
connaissons aussi. Cela peut aller de choses anodines comme un
pique-nique qui tombe à l'eau jusqu'à des situations
plus complexes comme un projet de mariage qui est rompu, une
carrière professionnelle qui est stoppée. Les causes
peuvent aussi être multiples, allant de la pluie ou une
migraine jusqu'à des raisons plus tragiques comme un échec,
une rupture, un accident, un décès. Mais ce qu'il
est important de souligner ici, ce n'est pas tant l'évocation
des multiples situations et causes, mais plutôt la manière
dont nous réagissons à ces bâtons mis dans
nos roues!
Il y a plusieurs possibilités de réaction aux contretemps
fâcheux de la vie. Selon que nous sommes introvertis (tournés
sur soi-même) ou extravertis (tournés vers les autres),
nous réagirons différemment. Voici quelques manières
de réagir (certains s'y reconnaîtront rapidement
!):
- on peut pleurer sur soi-même, se morfondre dans le découragement,
s'apitoyer sur soi-même et se dénigrer : c'est l'auto-accusation
stérile, malsaine et destructrice de soi-même ;
- on peut réagir en accusant le monde entier, en chargeant
les autres de la cause de l'échec : c'est la faute à
l'autre (mon conjoint, mes parents, un professeur, un collègue,
le chef);
- on peut aussi se mettre en colère, taper du pied, ne
pas accepter la "porte fermée" et vouloir
à tout prix l'ouvrir par soi-même, ce qui peut mener
à un échec encore plus grand;
- on peut aussi accuser Dieu, lui en vouloir ("Il ne
m'a pas écouté, il n'a pas exaucé ma prière"),
lui retirer notre confiance et se détourner de lui.
Toutes ces réactions, plus ou moins fortes, plus ou moins
exprimées, ne mènent pas à grand-chose et
n'aident pas elles enferment la personne sur elle-même,
elles enferment les autres et paralysent toute action.
Comment l'apôtre Paul a-t-il réagi à cette
"porte fermée"? Sa réaction sera
très instructive pour quiconque se trouve devant une barrière.
Loin de se désoler ou de se mettre en colère, Paul
va utiliser la route barrée pour construire quelque chose
d'autre, quelque chose de nouveau; il transformera le désavantage
en avantage. En avantage pour lui, pour les autres, pour Dieu.
La route barrée est devenue ouverture à d'autres
possibilités. Paul est resté ouvert à l'appel
de Dieu et Dieu lui a confié une autre mission.
Dans sa résidence surveillée, Paul ne s'est pas
morfondu ni ennuyé. Il a mis son temps libre (!), sa connaissance,
son expérience et sa foi en action: il a pris un parchemin,
une plume, de l'encre et s'est mis à écrire. Non
pas ses mémoires (cela aurait été intéressant
pour nous), mais des lettres. De sa prison sont parties plusieurs
missives; elles furent adressées à des chrétiens,
à des Églises, et le miracle c'est que nous en
possédons quelques-unes : la lettre aux chrétiens
d'Éphèse, de Colosses, de Philippes, une lettre
personnelle à Philémon; plus tard, à nouveau
en prison, il écrira deux lettres à Timothée
(et peut-être d'autres que nous ne possédons pas).
A travers ces lettres, l'Évangile est allé beaucoup
plus loin que l'Espagne, géographiquement et historiquement
parlant. La route barrée pour l'Espagne est devenue une
extraordinaire source de bénédiction pour des milliers
de croyants en tous lieux et en tout temps!
Nous n'atteindrons pas toujours nos "Espagnes",
les châteaux que nous voudrons y construire s'effondreront
parfois, beaucoup de projets n'aboutiront pas. Quelle sera notre
réaction?
Non, la route barrée n'est pas synonyme d'échec
ou de faillite ; elle peut, au contraire, être promesse
pour d'autres routes, ouverture à d'autres possibilités,
occasion de bénédiction formidable pour soi-même
et pour les autres. Sachons, avec Dieu, transformer les routes
barrées en chemins nouveaux.
Alors, en ce temps de vacances (et en tout temps), partons
pour "l'Espagne" que Dieu souhaite pour nous!
René LAMEY
© Tous droits de reproduction
réservés. Détail des conditions
de reprise des articles
Toute remarque et tout courrier
à propos du Messager
Chrétien