Ouadhia, fin août 2000 (abrégé).
Enfin le temps venu pour un mot de notre part ! L'espoir de rédiger
cette lettre durant la pause d'été s'est
avéré vain. Nos coéquipiers étaient
en vacances ou suivaient le cours de base et des laïques
à Oran. Ensembles avec Tatiana et Tarik, nous avons assuré
la permanence. Le manque d'eau dans la canicule, des travaux
de remise en état des locaux, des visites et des visiteurs
ont finalement pris tellement de temps que la lettre en est restée
à ses débuts.
Ces deux dernières années ont été
marquées par la faiblesse croissante du père d'Erna,
puis son décès à la mi mai 2000, à
l'âge de 97 ans
Voici quelques moments de tout ce que nous avons vécu
ces derniers mois. La vie de la communauté suit
son rythme habituel avec de l'information, de l'évangélisation,
les cultes, les études bibliques, l'enseignement, la cure
d'âme et la communion fraternelle. Nous sommes dans un
temps de réveil et d'ouverture à la foi chrétienne.
Les événements et problèmes qui y sont liés
sont déjà mentionnés dans les Actes des
apôtres et les épîtres de la Bible.
La station de la Mission Méthodiste étant un lieu
de culte officiel de l'Église Protestante d'Algérie,
nous nous sommes toujours efforcés de laisser la porte
largement ouverte. Peu d'Églises dans le pays ont
cette possibilité. Ainsi, au culte - à côté
des quelques frères et soeurs de Ouadhia - se trouvent
des chrétiens de tous azimuts. Il y a toujours aussi des
nouveaux et des curieux, qui aimeraient voir le déroulement
d'un culte chrétien algérien. Parfois, ils
sont étonnés de constater qu'on chante, lit et
prêche en trois différentes langues. Louanges, prières,
témoignages, messages, Sainte cène et une fois
par mois les baptêmes (s'il y a des candidats), vous font
oublier que vous avez ainsi passé 3 à 4 heures
ensembles ! Puis, tout en dégustant un casse-croûte
aux légumes, vous pouvez vous joindre au groupe des femmes
ou hommes pour poser des questions brûlantes concernant
la foi ou partager des expériences !
En moyenne 60 à 100 personnes participent au culte. La
composition de l'assistance varie de semaine en semaine. Dans
les villages se forment continuellement de nouveaux groupes ;
de ce fait le nombre de participants au culte reste plutôt
constant.
Nombreux sont aussi ceux qui viennent durant la semaine en
quête d'informations concernant la foi chrétienne.
Ils veulent " voir l'Église ", et s'attendent
à une cathédrale ! ou bien ils désirent
savoir " pourquoi on a changé de religion ".
Les voitures de la station portent, à côté
du logo d'une personne versant de l'eau dans des cruches, l'inscription
Eau vive en tamazight et arabe. Celui qui cherche à
connaître le sens de l'écrit reçoit en plus
de la réponse un Évangile.
Les études bibliques de lundi soir et jeudi après-midi
servent à fortifier notre foi. Elles nous apparaissent
de la plus grande importance en face de toutes ces influences
para-chrétiennes qui, même ici, se font de plus
en plus sentir.
Nos collaborateurs préparent des cours et des leçons
dans la langue locale. Leur thème principal est l'introduction
dans la foi chrétienne et son application dans la vie
de tous les jours. Les nouveaux convertis sortent d'une religion
qui connaît un Dieu, un Jésus, Moise et des prophètes,
mais ils en ont une compréhension différente de
celle de la Bible. L'aide pour une meilleure approche vient de
préférence de quelqu'un qui a vécu personnellement
ce changement.
Très souvent il faut produire le matériel
(livres et cassettes) sur place, adapter et photocopier en trois
langues (français, arabe, kabyle).
Il y a quelques semaines, après un travail de collaboration
nous avons pu terminer la 3e " édition " et
la " fabrication artisanale " du recueil des cantiques
kabyles. Après l'ajout de 30 textes de chants chrétiens
nouveaux, il en contient maintenant 89 plus la prière
" Notre Père " et la " confession de foi
". L'importation des Bibles ne se fait toujours qu'au compte-gouttes.
Il y a des démarches en cours pour l'obtention d'une antenne
de la Société Biblique Internationale, c'est un
grand sujet de prière. Le magasin de la Bible à
Alger, fermé il y quelques années, n'a pas encore
pu rouvrir.
La révision de l'ébauche de l'Ancien Testament
en kabyle avance bien. Les quatre membres de l'équipe
y travaillent quatre jours entiers par semaine. Trois livres
et demi sont ainsi déjà révisés à
fond. Les textes d'Exode, Lévitique et Nombre sont dans
des familles pour être lus à haute voix et testés.
Une fois le Pentateuque réuni, nous espérons pouvoir
les rendre accessibles à un lectorat plus large, surtout
à des groupes pour l'étude. Nous constatons souvent
que des analphabètes, ne connaissant que les lettres
latines, arrivent en un temps record à lire leur langue
maternelle !
La cure d'âme se fait surtout pour nos collaborateurs
et membres de la communauté. Dans ce pays, il y a peu
de gens qui n'ont pas été d'une manière
ou d'une autre en contact avec l'occultisme. Même après
la conversion il faut parfois de l'aide pour être libéré
de liens occultes ou pour surmonter le racisme et la rancune.
Pardonner à la suite du pardon reçu, voilà
des pas concrets dans la marche du chrétien. L'accompagnement
des nouveaux convertis demande beaucoup d'amour, de patience
et de sagesse.
Les célébrations de Noël restent toujours
les moments forts de la vie communautaire. La dernière
fois c'est un cinéaste et écrivain algérien
qui y a participé. Il a tourné un film documentaire
de 45 mn sur le thème " Je suis chrétien
". Il y a mis des extraits de notre culte avec des témoignages,
des baptêmes et une pièce théâtrale
de la plume et régie de Nadia : " Le fils prodigue
". Ce film, bilingue, a été montré
ce printemps à l'université de Tizi-Ouzou suivit
d'un débat auquel ont participé quelques-uns de
nos collaborateurs.
Il y avait aussi " La première rencontre de jeunes
chrétiens algériens " en été
1999, avec 80 participants et 30 encadrants, entièrement
organisée et financée par les Églises locales.
Elle a été le sujet d'un article détaillé
dans la presse locale. Le journaliste a participé à
l'événement en tant qu'observateur.
Nous nous réjouissons des contacts et de la collaboration
avec des chrétiens et des Églises de l'étranger
(Suisse, France, Égypte, Jordanie etc.). C'est enrichissant
et cela évite l'égocentrisme.
Nos chantiers, celui du grand mur de soutènement
et celui du " foyer - école biblique ", avancent
avec une lenteur parfois désespérante ! Tantôt
c'est l'argent qui manque, tantôt ce sont les ouvriers
qui ne sont pas disponibles ! Il y a de quoi apprendre la patience
!
Notre équipe de travail se compose actuellement
de dix personnes.
Depuis quelque temps, paraissent dans la presse algérienne
des articles plus ou moins neutres sur la croissance du nombre
de chrétiens en Algérie. Ouadhia y est souvent
mentionnée. La présence chrétienne à
Ouadhia fait partie de l'histoire de la région.
Durant de nombreuses années elle s'est traduite par un
travail social. Mais Ouadhia n'a pas une bonne réputation
: il y a trop de bars ! L'Église grandissante par contre
est pour beaucoup signe d'espoir. Le fait que la vie sur
la station ait continué même durant les années
les plus dures traduit pour eux l'amour et la puissance divine.
Ainsi une pétition, lancée par des extrémistes
pour fermer l'Église, n'a pas trouvé beaucoup de
signataires.
L'état essaie par des relevés statistiques de
se faire une idée du nombre de chrétien dans le
pays. La tendance du gouvernement est incertaine ; apparemment
on essaie de tenir compte des différents courants et ainsi
d'équilibrer le " navire ".
Économiquement nous vivons un temps de grands changements.
Le passage du système socialiste à l'économie
de marché agrandit de jour en jour le fossé
entre riches et pauvres. D'un côté il n'y a plus
de difficultés de ravitaillement, de l'autre côté
il y a bien des gens qui n'ont plus les moyens d'acheter le strict
nécessaire, pendant que d'autres ramassent l'argent à
la pelle ! L'activité du bâtiment continue sans
diminution, en partie grâce aux devises des travailleurs
algériens en Europe.
Dans l'industrie - apparemment pour cause de restructurations
- des licenciements en masse produisent des actes de désespoir,
la corruption, la criminalité et la dégradation
morale. Dans les rues on rencontre plus fréquemment des
mendiants, surtout des femmes. A cause du découragement
général il y en a beaucoup qui cherchent par tous
les moyens à quitter le pays.
Mais vu la mentalité, une amélioration de la vie
ne peut venir que d'un changement intérieur à chacun.
Le fait que par la grâce de Jésus-Christ
beaucoup de gens aient trouvé une sortie de la dépression
et la voie vers une vie dans l'amour et la responsabilité
renouvelle notre espérance.
Erna et Abdelkader terminent en évoquant les problèmes
de sécheresse.
Abdelkader + Erna SAÏM-HUBER
Communauté Chrétienne
B.P.51, DZ 15450 OUADHIA Algérie
Tél. : (213) 3 32 31 28
Fax : (213) 3 32 34 40
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